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Le delta du Sénégal se situe entre le Sahel, le Sahara et l’océan Atlantique. Sa position sur la
frontière sénégalo-mauritanienne, les quantités d’eau douce disponibles toute l’année et
l’importance de son potentiel de surfaces agricoles et irrigables ont fait de ce milieu humide un
espace vital (agriculture, élevage, tourisme, pêche, etc.). Toutefois, si depuis la colonisation
différents programmes de développement ruraux ont bien été mis en œuvre, il faut convenir que
les échecs ont aussi été nombreux.
La construction des barrages de Manantali sur la haute vallée (1987) et de Diama dans le
delta (1985) a ouvert de nouvelles possibilités de développement agropastoral. L’objectif est, en
particulier, de permettre l’irrigation de 350 000 ha de terre, ce qui entraîne des arrivées massives
de populations et des investissements privés conséquents (riziculture, agribusiness), mais venant
profondément affecter les modes de gestion traditionnels de ces espaces de vie (propriété
foncière par ex.) et de production (culture de décrue, pastoralisme, pêche en eau douce, etc.)
pour partie spécifiques à chaque ethnie. Les structures anthropologiques et les représentations
sociales étant différentes selon les peuples qui habitent ce delta (Wolof, Peul, Toucouleur,
Maure, etc.), non seulement celles-ci se répercutent spécifiquement sur l’organisation foncière,
politique locale, mais en plus elles contribuent à définir, par leur multiplicité et leur distribution
spatiale, un territoire particulièrement complexe dans ses rapports à l’espace, sa mise en valeur,
etc. que nous analysons
Cette thèse montre que les dynamiques spatiales et socio anthropologiques sont impactées
par la gestion intégrée de l’eau qui se met en place à travers l’État du Sénégal et les institutions
de gouvernance à l’échelle du bassin versant. Sur le plan spatial, l’activité agricole se développe
au détriment des espaces traditionnels. Sur le plan socio anthropologique, les populations
assimilent la technicité moderne au travers du filtre des réalités locales, ce qui est à la base d’un
système hybride qui est au cœur de la transition technologique dans les aménagements
hydroagricoles.
La question foncière reste un déterminant de l’exploitation de toutes les terres riz cultivables
à l’horizon 2025 (objectif fixé par le Schéma Directeur d’Aménagement et de Gestion des Eaux).
L’atteinte de cet objectif devra passer par une réforme foncière prenant en compte les systèmes
hybrides qui se développent dans le delta du Sénégal.